jeudi 25 juin 2015

Spiritueux



Le whisky est l'eau-de-vie originelle


The Scotch whisky it's Scotland's oil.  C’est le produit d’exportation le plus célèbre d’Écosse, le deuxième en valeur après le pétrole. Savoir ou non si cette boisson nous vient d'Irlande ou du pays des Scots reste un débat de passionnés, même si les meilleures sont distillées dans ces deux pays. Si on a coutume de dire que l’Irlande a la plus ancienne distillerie officielle du monde — l’origine d’Old Bushmills remonterait à 1608 —, la première à obtenir une licence fut la distillerie écossaise Glenlivet en 1824.
Le mot « uisky » est apparu pour la première fois en 1618 dans les dépenses funéraires d'un seigneur highlander. Un autre document d’époque mentionne la fabrication d'aqua vitae ou encore « uisge beatha » en gaélique. À l'origine, la distillation était l'œuvre de paysans. Dans les Highlands, l'orge est la céréale la plus répandue, elle fournit le pain et le whisky. Comme en France à l’époque, l’eau-de-vie constitue un revenu agricole supplémentaire non négligeable.
Les amateurs choisissent souvent un single malt, un whisky élaboré à partir d’orge malté uniquement, provenant d’une seule et même distillerie. Un blended scotch, plus rare, est un assemblage de single malt et de blé, de maïs ou de seigle. Le goût dépend autant de la durée du vieillissement que de la qualité du fût dans lequel il effectue sa maturation. De nombreux whiskys sont issus d’une maturation principale en fût de bourbon américain, puis d’une finition en fût de Sherry.
Il n'y a pas vraiment de règle pour l’apprécier. Certains ajoutent un glaçon, d'autre le préfèrent sec ou l’allongent d'eau gazeuse, une tradition d’expatriés sous les tropiques. Néanmoins, il faut toujours ajouter un soupçon d’eau de source pour libérer les arômes et ne pas être anesthésié par l’alcool.
Fondée en 1879 par James Fleming, la distillerie Aberlour, en gaélique « la bouche du ruisseau qui murmure » se trouve au cœur du Speyside, en Écosse, au confluent des rivières Spey et Lour. Elle profite de l’eau de source filtrée par la masse granitique du mont Ben Rinnes. Aberlour produit entre autres un malt brut dans la plus fidèle tradition du XIXe siècle. À’bunadh signifie « à l’origine » en gaélique. Il est non filtré à froid et embouteillé brut de fût, c'est-à-dire sans ajout d’eau. Sa méthode de fabrication rappelle le goût puissant et viril des malts artisanaux d'autrefois.
À’bunadh s’adresse aux amateurs à la recherche de goûts puissants, mais non tourbé. La richesse gustative des singles malts d’Aberlour permet d’y associer la haute gastronomie. Récemment, Emmanuel Renaut, chef triplement étoilé du restaurant Flocons de Sel à Megève, a présenté une interprétation toute personnelle et inédite d’accords entre mets de gibiers et une collection exceptionnelle de la distillerie.
À la même époque, sur l’île d’Islay, la distillerie Ardbeg commence à produire un single malt parmi les plus tourbés et fumés d’Écosse. Un goût iodé, presque médicinal incomparable. Son Uigeadail, littéralement « noir et mystérieux », est un monstre considéré comme l’un des meilleurs whiskys du monde. Une expérience incontournable.
Au cœur de l'Écosse, à Dufftown, la distillerie The Balvenie est à coup sûr la plus intéressante à visiter, car très peu de choses ont changé depuis sa fondation. Il n’existe plus de distillerie où une partie de l’orge est cultivée sur ses terres, où le maltage est fait sur sa propre aire. Où des tonneliers restaurent les fûts et les alambics sont l’affaire du chaudronnier. Chez The Balvenie, le vieillissement a lieu dans des chais originaux très bas de plafonds et au sol de terre battue. Des conditions de maturation optimales.
La distillerie a récemment sorti deux singles malts 50 ans d'âge issus de la même distillation, et placés dans deux fûts de même type le 28 mai 1963 ! Si seulement 259 bouteilles en ont été extraites, 159 seront vendus dans le monde, dont quatre en France. Un nombre réduit de bouteilles que l'on doit à l'évaporation pendant le vieillissement. Un phénomène poétiquement nommé « la part des anges » qui a inspiré le réalisateur Ken Loach pour son film éponyme primé à Cannes il y a deux ans.
Pour David Stewart, icône des maîtres de chais, « il est rare qu'un whisky vieillisse aussi joliment pendant un demi-siècle, mais que deux nouvelles expressions distillées le même jour aboutissent à un tel résultat, est très surprenant ». Une rareté facturée 30 250 € tout de même !
Autre single malt, le whisky Scapa est le mythe des îles d'Orkney. C'est l'une des distilleries les plus septentrionales d’Europe, dans les « îles de l’ancienne aventure ». Ces eaux-de-vie sont entreposées dans des chais en bord de mer, lui conférant des notes aux accents marins. Le 16 ans d'âge est une superbe élaboration pour un résultat d'une grande finesse. 
Si en Écosse on appelle « Single Malt » un whisky issu d'une unique distillerie, en Irlande on parle de whiskey « Single Pot Still », pot still étant la traduction anglaise de l’alambic à repasse. Mais contrairement au single malt, fait exclusivement à partir d'orge maltée, les « Single Pot Still » peuvent être assemblés à partir d'orge maltée ou non. À l'origine, une histoire de taxe sur cette céréale qui donne à l’arrivée une eau de vie réputée plus pure, plus douce et plus moelleuse. Probablement aussi parce que cet alcool est produit à partir d’une triple distillation. Avec le Bushmills 21 ans Madeira, cette distillerie a réalisé un Irish whiskey d’une rare profondeur, à la fois doux et complexe. Malheureusement très rare sur le marché, car Bushmills ne possède que peu de fûts ayant contenu du madère et elle est la seule en Irlande à avoir du single malt de cet âge.
Retour en Écosse avec le seul blend de la sélection. C'est en 1801 que James et John Chivas créent la maison Chivas Brothers, une épicerie fine à Aberdeen. À cette époque, le whisky pur grain ou pur malt était trop âpre et un peu rude. Les frères Chivas rêvent d'obtenir un breuvage plus doux et plus rond. Ils assemblent whiskys de grain et de malt, dont Longmorn, Glein Keith, Bareval… et donnent naissance au « blended ». C’est en 1909 que le Chivas Regal est né, probablement le premier whisky haut de gamme du monde. Plus rare, un blend de grande qualité vieilli 25 ans en fût a vu le jour en 2007.
Question vieillissement, le pionnier dans l’affinage dans d’autres fûts que ceux de whisky reste Glenmorangie. Cette distillerie des Highlands est aussi équipée du plus grand alambic d'Écosse. Elle produit des breuvages de 10, 15 et 18 ans, mais aussi le Signet : un assemblage de ses plus anciens distillats vieux de plus de trente ans, alors que le maltage s'effectuait encore sur place. Signet proviennent, en partie, d’un malt d'orge « chocolat » grillée unique et des « fûts de designers » fabriqués sur mesure pour Glenmorangie à partir de chêne blanc d'Amérique. Gleann mór innse, du gaélique écossais, se traduit par « vallon des grandes prairies ».


Sélection
Aberlour A’Bunadh 60%. 65 €. La grande épicerie du Bon Marché.
Ardbeg Uigeadail 54,2%. 73,45 €. La grande épicerie du Bon Marché.
Balvenie 14 ans Carribean Cask 43%. 64 €. La Maison du whisky.
Bushmills 21 ans Madeira 40%. 139 €. Chez Lavinia.
Chivas Regal Original 25 ans d’âge 40%. 239 €. cuveesandco.com
Glenmorangie Signet 46 %. 167 €. La Maison du whisky.
Scapa 16 ans d'âge 40 %. 58,80 €. La Maison du whisky.