vendredi 12 décembre 2014

Bière



Les brasseurs à la recherche du goût d'autrefois

En 1879, la Gallia (Gaule en latin) était brassée dans le quartier d’Alésia, à Paris.

La bière est affaire de passion. Une passion planétaire qui dure depuis plusieurs millénaires. Elle arrive en Europe vers 5000 ans av J.-C. Chez les Gaulois, la cervoise est fabriquée en famille jusqu’à l’apparition du vin qui change les habitudes de consommation. Si la bière a toujours fait partie du patrimoine culturel français, le renouveau du paysage brassicole date de la fin des années 90. La richesse et la variété des bières produites s’expriment désormais en milliers de marques (environ 2 000) et une multitude de brasseries artisanales et de microbrasseries ont vu le jour ces dernières années, à l’ombre des grands groupes brassicoles. « En 2014, on compte environ 600 brasseries en France, le troisième pays européen en nombre d'établissements, précise Philippe Vasseur, le nouveau président des Brasseurs de France, et ancien ministre de l'Agriculture d'Alain Juppé. Et parmi elles, 450 brassent plus de 100 hectolitres. » Certes, la production des petites brasseries représente à peine 2% de la consommation française estimée à 20 millions d'hectolitres, mais elles témoignent d'un engouement pour les bières originales et leur grande diversité de saveurs.
Sans oublier la mode du fait maison, qui fait que des Français se remettent à brasser eux-mêmes. On trouve sur Internet des kits de brassage pour faire sa bière soi-même, sans garantie de succès car la bière d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec la cervoise : si la recette est simplissime, le brassage nécessite un certain savoir-faire. Avec ses assemblages de différentes variétés de houblon et de malt torréfié, la complexité des levures, la prise de mousse, la qualité de l’eau et la garde, on se rapproche beaucoup de la méthode champenoise.
Au sortir de l'hiver, on voit arriver la bière de printemps. Contrairement à ce que l'on pense, ce n'est pas que du marketing. Comme le rappelle Philippe Vasseur, originaire du Nord, « la bière de printemps est l'héritière d'une tradition du Nord-Pas-de-Calais. Elle correspondait à la première bière de garde de l'année, mûrie dans le froid de l'hiver. C'est parce que les brasseurs restent attachés à cette tradition que, chaque année, ils proposent un brassin spécial de printemps en bouteilles ou à la pression dans les bars. »
Chaque ville, chaque bistro veut sa bière. Et Paris n’échappe pas au phénomène avec la Gallia (Gaule en latin). Remontant à 1879, elle était autrefois brassée dans le quartier d’Alésia mais avait disparue dans les années 60. On doit sa renaissance à Jacques Ferté et Guillaume Roy, issus tous deux de l’Ecole de management de Normandie (EMN). L’un est fils d’agriculteur, l’autre, auteur d’un mémoire sur l’industrie brassicole. « Nous voulions une bière premium. Avec plus de matière, des goûts plus affirmés ; des arômes novateurs, explique Guillaume Ferté. On veut retrouver le goût comme autrefois. La bière c’est du vivant. On s’inspire de l’Angleterre qui fait des brassins de type pale-ale. »
Leur gamme est basée sur de nouvelles saveurs. « La Gallia blonde de base, une blanche plus douce à l’arôme d’absinthe qu’on a développée avec l’Institut supérieur d'agriculture de Lille, et notre nouvelle pale-ale, légère mais aromatisée, inspirée des Anglais », précise-t-il.
Simon Hicher, un jeune ingénieur agronome spécialisé par un master en génie brassicole à Louvain, en Belgique, a aussi été recruté pour travailler sur une gamme de petits brassins.
Les deux comparses qui gèrent leur brasserie comme une start-up avec, entre autres, Audacia, le fond de Charles Beigbeder comme investisseur, ne sont pas à court de projets. En 2015, ils promettent une brasserie 2.0 en région parisienne. « Pourquoi pas à Pantin où on a déjà notre atelier de brassage. Il nous faut un lieu à la fois de production et culturel, pour accueillir le public, annonce Jacques Ferté. Et véhiculer l’image de Gallia. »



Gallia, bière blonde de Paris
- Bière de type Pilsner
- Degrés d'alcool : 5,5°
- Malts : Pilsen, Cara Ruby, Froment
- Houblons : Zatec, Premiant
- Servir frais (environ 6 °C)
- Bouteille de 33 cl, 2,50 € (Monoprix, La Grande Epicerie, Lafayette Gourmet)
- En bouche : Une explosion d’écorces d’agrumes et de houblons aromatiques qui enrobent intensément le palais pour finir sur une note douce amère. Une légère dose de malts mielleux apporte sa couleur ambrée et cet aspect soyeux propre à cette pale-ale.




PETIT LEXIQUE
Brassin Comme le boulanger a sa fournée de pain, le brasseur a son brassin. Certaines brasseries de taille moyenne en réalisent un à plusieurs par jour.
Fermentation Une première (ou primaire) fermentation vise à produire de l’alcool après l'ensemencement du moût avec des levures.
Trois méthodes pour plusieurs types de bières.
Fermentation basse pour les Blonde, Fine, type Pils ou Lager. 8 à 10 jours à basse température, les levures restent au fond de la cuve. Fermentation haute : pour les Pale Ale, Stout, Blanche ou Bières d'abbaye. 3 à 5 jours à température moyenne, les levures remontent à la surface. Fermentation spontanée pour la Lambic. Des levures sauvages naissent dans un moût à l'air libre.
Garde Après la fermentation primaire, la bière est stockée dans une cuve de garde pendant un mois. C’est une fermentation secondaire qui va affiner la bière et finir la conversion des sucres fermentescibles. Avec ensuite une refermentation en bouteille pour la saturer en CO2.