mercredi 19 novembre 2014

Gastronomie bourguignone



Gastronomie

Saveurs de Bourgogne 


05 I 03 I 2005
La Bourgogne existait bien avant la France. D’Alésia à Fontenoy, elle en fut même le berceau historique. Parfois sa rivale politique au cours des siècles. Cette région rurale s’accommoda sans drame, en 1791, de sa division en quatre départements (Côte-d’Or, Nièvre, Saône-et-Loire et Yonne) qui sont devenus aujourd’hui les fleurons les plus prestigieux en matière de gastronomie française. 
Chaque produit né de cette terre bourguignonne est unique . « La liturgie de la table est une manifestation de haute culture », a écrit l’écrivain bourguignon Henri Vincenot. Viande charolaise, volailles de Bresse, truffe aux salaisons ou encore miel, crèmes et confitures élaborées notamment avec les petits fruits des Hautes-Côtes (framboises, mûres, cassis)… Ici on aime les saveurs franches et fraîches.
En Bresse bourguignone, l’élevage des volailles est un art. « Le Mans et La Flèche se disputent jusque dans le sanctuaire des lois, la gloire de nous envoyer les plus succulants poulardes. La Bresse seule pourra les mettre d’accord en les départageant » , remarquait le gastronome Grimod de la Reynière, en 1804. Ce que confirmera Brillat-Savarin dans sa Physionomie du goût. Bleu, blanc, rouge : le poulet de Bresse est un patriote aux pattes bleutées, à la crête et aux barbillons rouges, un plumage, une peau et une chair blancs. Au delà de la technique d’élevage (essentiellement des vers et des insectes picorés dans les hautes herbes des prés bressans), poulet, chapon et poularde sont présentées sur les étals « moulées ». On a l’impression que leurs membres se fondent dans la graisse (1).

La réputation des bovins charolais n’a rien à envier à celle des volailles de Bresse. De couleur rouge vif assez foncé, la viande de bœuf charolais est persillée : veinée de suffisamment de graisse pour avoir du goût. Deux labels existent : le label rouge Charolais et le Charolais terroir. En 1867, lors de l’Exposition universelle, cette race a remporté le premier prix. Mais le boeuf blanc du Charolais est envoyé pour la première fois à Paris, en 1747, par un marchand fermier de la seigneurie d’Oyé dans le Brionnais. Aujourd’hui encore, un restaurant parisien, le Galvacher (2), du nom du gars vacher en patois qui guidait les troupeaux sur les routes, perpétue cette histoire en servant une viande goûteuse en direct de sa ferme de Lucenay-les-AixChaque terroir a ses saveurs. Comme la charcuterie morvandelle ancrée dans la culture de la région. Son jambon cru, salé et séché à l’air libre offre une texture moelleuse et assez prononcée. « J’ai fais un rêve, que le jambon du Morvan soit aussi connu que le jambon de Parme » aime à dire Fernand Dussert (3), fournisseur de Bernard Loiseau, le trois étoiles de Saulieu. Un rêve ce jambon de neuf mois qui pend traditionnellement aux poutres des fermes morvandelles, toujours élaboré selon une méthode ancestrale, n’as pas encore la renommée de son rival. Comme pour les fruits, la longue maturation dévoile des saveurs et des arômes cachées aux senteurs balsamiques du Morvan. 
Il côtoie souvent sur les assiettes le tendre jambon persillé. Son secret : un savant dosage entre viande (épaule et jambon de porc) et farce, faite d'un hachis de pied de veau, de gras du bouillon et d'épaule, assaisonné de persil et d'ail. Les « Journées gourmandes du Morvan », à  Saulieu, au mois de mai, honorent ces saveurs qui exhalent les vertus de la région.  Autres temps forts ? Au mois d’août, Glux-en-Glenne fête les myrtilles et, en octobre, Saint- Léger-sous-Beuvray organise la foire aux marrons. 

N’oublions pas le diamant noir bouguignon
Certes confidentielle, la truffe de Bourgogne (Tuber uncinatum aux belles qualités : chair  croquante, arômes et saveurs évoquant la noisette. Ardents défenseurs de ce diamant, rare et saisonnier (il se consomme frais entre les mois de septembre et décembre), certains restaurateurs de l’Yonne le mettent au cœur de leurs préparations.
Traditionnellement, les Bourguignons apprécient aussi à leur table les escargots de Bourgogne (4). Ces fameux gastéropodes  cuisinés à la bourguignone, accompagnés d'ail et de persil, apparaîssent dans les livres de cuisine de la fin du XIXe. Ils sont servis au moment des fêtes de fin d'année. Vers 1900, il s’en vendait 800 000 kilos par an aux halles de Paris. Pour être sûr de sa provenance, il doit être estampillé « Maîtres escargotiers de France ».
 Et les fromages ? Il y en a pour tous les goûts, la Bourgogne en recèle vingt-sept sortes. Parmi les plus connus, citons le fameux Epoisse ou le Citeaux, fabriqué par les moines cisterciens, il évoque la douceur. L’AOC époisses, plus célèbre, est lavé au marc de Bourgogne pendant son affinage. Sous ses allures de dur, ce fromage a un cœur tendre. Son nez puissant exhale des saveurs fruitées, franches et crémeuses.
 Parfois, la Bourgogne a des parfums d’Orient… Le pain d’épices, fait de farine de froment, de miel fort en goût et de quelques épices aux parfums nostalgiques (cannelle, anis, clous de girofle) a été importé des Flandres par les ducs de Bourgogne. Il est fabriqué entre autre par la maison Mulot et Petitjean (6), à Dijon, un magasin dont l’antique devanture remonte au Moyen Age. Dès cette époque, les nonnettes sont devenues célèbres par leurs fragrances suaves d’épices. Sans oublier le miel, indispensable à leur confection et issu notamment du parc régional naturel du Morvan et du Gâtinais. Le pain d’épice est incontournable, au moment de ces fêtes, dans les familles bourguignonnes. 

(1) Volailles de Bresse.
(2) Le Galvacher : 64, avenue des Ternes, 75017 Paris. Tèl. : 01 45 74 16 66. 
(3) Fernand Dussert (maître charcutier depuis 1903) : Allée du Vieux Château, 58430 Arleuf (Nièvre). Tèl. : 03 86 78 82 00.
(4) Escargots de Bourgogne.
(5) Maison Mulot et Petitjean : 13, Place Bossuet,  21000 Dijon. Tèl. : 03 80 30 07 10.


Les bonnes adresses
Salé
La moutarde 
Ce condiment date de 1634, quand la ville de Dijon impose à la profession de moutardier ses premiers statuts. C’est la véritable gloire de la capitale ducale. Depuis le XVIIIe siècle, elle est composée de graines de sénevé, une plante herbacée crucifère à fleurs jaunes, broyée avec du vinaigre de vin ou d'alcool. Au XIXe siècle, Beaune comptait une trentaine de moutardiers. Les établissement Fallot, à quelques pas des Hospices de Beaune , est la dernière maison indépendante qui continue de perpétuer ce savoir-faire.
Établissement Fallot : 31, faubourg Bretonnière. 21200 Beaune. Tél. : 03 80 22 10 02.
Les fromages 

Le soumaintrain et le saint-florentin, fromages de lait de vaches, sont produits dans la basse vallée de l’Armance, dans l'Yonne. Ces fromages de caractère sont à consommer bien affinés. Sans oublier le L’aisy cendré, enrobé de charbon de bois. Les fromages de chèvre sont produits un peu partout dans la région : bouton-de-culotte, claquebitou, mâconnais, petit fromage au lait cru, de couleur ivoire, parfois bleutée ou les pâtes molles du Charolais. La tomme des moines, tromage de vache, tomme de chèvre.
Ferme de l'abbaye de la Pierre qui Vire : 89630 Saint Léger-Vauban. Tél. : 03 86 33 03 73. 
Laiterie de la cote : 10 route Nationale 74, 21220 Brochon. Tel : 03 80 34 00 00. 

Sucré 
La crème de cassis de Dijon 
La crème de cassis de Dijon ne saurait être fabriquée que sur la commune de Dijon, précise un arrêté de la cour d'appel de Dijon en 1923. Produite ailleurs, cette liqueur, issue d'une lente macération du fruit dans l'alcool, est néanmoins exquise. D'ailleurs, il y a plus d'un liquoriste dans la région de Nuits-Saint-Georges, et dans l'Yonne. Une bonne crème de cassis, dit-on en Bourgogne, se reconnaît par son degré d'alcool (au moins 15 degrés) et un taux minimum de sucre de 400 g par litre. 
Lejay-Lagoute : 19, rue Ledru Rollin, 21070 Dijon. Tél. : 03 80 78 43 43 
Ferme Fruirouge : Concoeur, 21700 Nuit-Saint-Georges. Tél. : 03 80 62 36 25. 
L'anis de l'abbaye de Flavigny-sur-Ozerain 
Les boîtes rondes ou ovales sont célèbres. Sur les dix décors existants, le plus connu est celui de la « fontaine de la recluse ». Il représente un berger et une bergère, assis près d'une fontaine, l'abbaye en fond. Des petites dragées délicieuses de sucre blanc de la grosseur d'un petit pois et renfermant, en guise de surprise, un grain d'anis parfumé. Le seul anis confit cité dans l’article du Grand Larousse illustré du XIXe siècle consacré à la plante et à ses dérivés. 
Anis de l'abbaye de Flavigny : 21150 Flavigny sur Ozerain. Tél. : 03 80 96 20 88. 
Les Négus de Nevers 
Tous les ans, la maison Grélier créait un nouveau bonbon et lui donnait le nom de l'évènement de l'année. Une année, Ménélik, Empereur d'abyssinie alias le négus, vînt en visite officielle en France où il fut reçu par le président de la république. Il donna son nom aux fameux Négus de Nevers, un caramel mou au chocolat enrobé dans un sucre cuit. 
Au négus : 96, rue François-Mitterrand, 58000 Nevers. Tél. : 03 86 61 06 85.